Comment opère le lobby de la Silicon Valley
On parle souvent du lobbying intensif des géants du numérique mais quelles stratégies réelles la Silicon Valley met-elle en oeuvre pour influencer la vie politique aux États-Unis ?
Un article de la dernière édition de The New Yorker est très instructif pour le comprendre. En voici quelques points clés :
La Silicon Valley s’est maintenu en grande partie à la marge de la vie politique jusqu’au milieu des années 2010, considérant qu’il s’agissait d’une perte de temps.
→ C’est alors que des entreprises de la mal nommée « sharing economy », telles que Uber, Airbnb ou TaskRabbit comprirent le besoin d’influencer la régulation dans les secteurs dans lesquels elles opéraient, telles que les transports, l’hôtellerie ou le marché du travail pour parvenir à leurs fins.
Un des secteurs les plus agressifs en la matière est celui des cryptomonnaies. Il est en train d’injecter des centaines de millions de dollars pour détruire les carrières de n’importe quel politique qui ne déclare pas ouvertement et sans limites leur soutien à cette industrie.
Le cas de Katie Porter, candidate malheureuse aux élections sénatoriales de Californie, a servi d'épouvantail.
→ Elle ne s'était même pas déclaré sur la question et ils ont dépensé $10 millions pour faire campagne contre elle pour en faire un exemple : n’importe quel candidat qui ne les soutienne pas activement s’exposerait à leur foudre.
La figure fondamentale derrière toutes ces actions est Chris Lehane. Il devint directeur des affaires publiques d’Airbnb en 2015, puis administrateur de Coinbase et est désormais le VP des affaires globales d’OpenAI.
→ Ce gourou est capable de créer des mécanismes incitatifs pour que les politiques ne daignent pas s’opposer aux géants de la tech, en leur faisant craindre les conséquences d’un tel positionnement.
→ Une des stratégies consiste à créer de toute pièce des catégories d’électeurs comme les « pro-crypto » ou les « propriétaires sur Airbnb », en magnifiant leur poids électoral et en transmettant aux candidats le risque de s’opposer à l’intérêt de ces derniers.
Dans tous les cas, ils réussissent à dévier les termes du débat concernant telle ou tel secteur dans une direction qui leur est favorable. Ainsi, la question “Les cryptomonnaies sont-elles une vaste escroquerie ? » devient “Est-il juste de brider l’innovation ? »
Concernant l’IA, ils sont en train d'élaborer une rhétorique consistant à opposer l’IA « démocratique » (à comprendre, états-unienne) à l’IA « autoritaire » (chinoise) en argumentant que la deuxième va s’imposer dans le monde si on encadre trop la première.
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